5 étapes pour intégrer le développement durable dans la budgétisation et la planification

budgetisation_et_planification.jpg

Cinq conseils pour intégrer le développement durable dans les processus opérationnels essentiels de votre entreprise.

Chaque mois, le REDD met en lumière un défi clé pour les dirigeants d'entreprises en matière de développement durable. Ces défis ont été identifiés par le Conseil des Leaders du REDD, un groupe d'entreprises canadiennes reconnues pour leur leadership en matière de développement durable. Ce mois-ci, nous mettons l'accent sur l’intégration du développement durable dans les processus opérationnels essentiels que sont la budgétisation et la planification d’entreprise. Dr. Nola Buhr de la Edwards School of Business de l’Université de la Saskatchewan et Dr. Rob Gray de la School of Management de l’Université de St. Andrews nous offrent leurs conseils. Ils recommandent aux entreprises de définir soigneusement les objectifs qu’elles souhaitent atteindre.

Les entreprises peuvent intégrer le développement durable dans la budgétisation et la planification d’entreprise en suivant les cinq étapes de base suivantes :

1.  Comprendre la signification réelle du développement durable.

Est-ce que vous et votre entreprise comprenez bien ce que signifie le développement durable? La réponse est presque certainement « non ». Le développement durable est un concept qui doit s’appliquer à l’ensemble de la planète. Pour ainsi dire toutes les données indiquent que l’humanité n’agit pas de façon durable à l’égard des questions environnementales ou sociales. Toute entreprise qui augmente son empreinte écologique (c.-à-d., presque toutes les entreprises), qui s’engage à accroître la consommation(idem) et qui ne place pas l’équité sociale au cœur de ses activités (idem) est presque certainement une entreprise non durable selon la définition de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement (Brundtland).

Ce n’est pas de la faute de l’entreprise, puisque telle est sa nature. Cependant, les entreprises sont coupables lorsqu’elles affirment être entièrement durables alors qu’elles ne le sont pas.

2.  Définir le sens du « développement durable » pour votre entreprise et déterminer quels facteurs vous souhaitez inclure dans le processus de planification et de budgétisation ou exclure de ce processus.

Le développement durable englobe : la protection de l’environnement, l’amélioration du bien-être économique et la création de sociétés en meilleure santé et plus équitables. Mais comment une entreprise peut-elle définir les limites pertinentes associées au développement durable, autrement dit la manière dont elle interprétera chacun de ces concepts? Par exemple, est-ce qu’une entreprise plus équitable signifie : a) que les employés sont rémunérés selon les taux en vigueur; b) que l’écart entre les employés les mieux et les moins bien rémunérés se resserre; c) que l’entreprise finance la banque alimentaire locale ou d) que l’entreprise finance un projet d’assainissement de l’eau en Afrique dans une région sans lien avec ses activités? Toutes ces initiatives, de a) à d), vous rapprochent du concept du développement durable bien que les entreprises motivées par le profit soient peu susceptibles d’agir ainsi.

Étant donné que les entreprises recherchent le profit, elles excellent lorsqu’il s’agit de mettre en place des mesures novatrices d’économies d’énergie, qui permettent d’économiser de l’argent tout en utilisant plus efficacement les ressources naturelles. Ces initiatives s’apparentent à de bonnes pratiques de gestion mais pas nécessairement à un développement durable profond.

3.  Définir votre horizon de rentabilité.

L’éco-efficacité contribue de façon positive au bénéfice en réunissant les ingénieurs et les comptables afin d’analyser les activités opérationnelles et de déterminer des occasions d’économies de coûts. Il est difficile de s’opposer à ce type de « développement durable » aussi longtemps qu’il demeure rentable. Cependant, quel est votre horizon de rentabilité? Vos initiatives « durables » doivent-elles être rentables ce trimestre, l’an prochain ou dans cinq ans? Les entreprises devraient adopter la philosophie de la gestion de la qualité totale, selon laquelle « mieux vaut prévenir que guérir ». À plus long terme, dépenses et économies peuvent devenir l’envers et l’endroit d’une même pièce.

Votre horizon temporel aura une incidence sur la façon dont vous reconnaissez les risques et dont vous vous préparez à les affronter. Une bonne gestion nécessite de faire face aux pressions en évolution, telles que de nouvelles législations environnementales et exigences des clients. La réflexion sur les délais devrait également permettre de reconnaître ce que l’entreprise ne peut pas faire, et il est plus que probable que l’entreprise ne puisse pas être réellement durable.

4.  S’assurer que la définition du développement durable de la haute direction est généralement comprise dans l’ensemble de l’entreprise et intégrée dans sa stratégie et ses objectifs.

Il ne suffit pas de définir les concepts. La définition du développement durable de la haute direction doit être communiquée dans l’ensemble de l’entreprise. Sa vision doit être fermement ancrée dans la stratégie et les objectifs de l’entreprise. La stratégie et les objectifs devraient, à leur tour, être intégrés dans les plans d’immobilisations et les budgets.

Chaque personne au sein de l’organisation doit comprendre ce que signifie la vision du « développement durable » de l’entreprise par rapport à ses activités quotidiennes.

5.  S’assurer que le système de gestion des performances fait état des initiatives de « développement durable » et les récompense.

Le système de gestion des performances doit surveiller et mesurer les objectifs de la société et en rendre compte afin que les gestionnaires puissent vérifier si les objectifs sont atteints et déterminer les sources de problème afin de prendre des mesures correctrices. Si le « développement durable » est intégré dans la stratégie et les objectifs de l’entreprise, il doit également être intégré dans le système de gestion des performances. Par exemple, il devrait être facile de déterminer si l’entreprise respecte la réglementation environnementale et atteint ses objectifs environnementaux.

La vision et les plans en matière de « développement durable » sont inutiles à moins qu’ils ne soient mis en œuvre avec succès. Les employés à tous les niveaux doivent être motivés, reconnus et récompensés lorsqu’ils atteignent des objectifs spécifiques (et réalistes).

Souvenez-vous, « ce qui peut être mesuré peut être géré ».

Des choix véritables : l’engagement d’une entreprise

Un exemple provenant d’Afrique souligne l’importance de définir des concepts, des objectifs et un horizon temporel pour intégrer le développement durable dans la budgétisation et la planification d’entreprise.

Entre 1990 et 1998, la prévalence du VIH en Afrique du Sud a bondi de moins de 1 % à plus de 22 %. En août 2002, l’entreprise Anglo American a annoncé son projet d’offrir une thérapie antirétrovirale (ARV) à l’ensemble de ses employés en Afrique du Sud. Même l’architecte du projet, le médecin en chef Dr Brian Brink, estimait qu’il s’agissait d’un « acte de foi ».

Mais en juillet 2010, il apparaissait clairement que les avantages du programme d’ARV l’emportaient nettement sur les coûts. Un mois de thérapie antirétrovirale coûtait 126 $ par employé à Anglo mais se soldait par des économies de 219 $.

Des employés en bonne santé font partie d’une société plus forte et plus équitable. Bien entendu, être en bonne santé constitue également une condition pour pouvoir travailler. Or, il est plus difficile de trouver des employés en bonne santé dans une communauté où 22 % de la population est séropositive. Que ce soit pour de nobles objectifs de développement durable ou simplement pour maintenir son effectif, Anglo American a défini la santé de ses employés comme objectif. Pour atteindre cet objectif, elle devait procurer une thérapie antirétrovirale à tous ses employés infectés, décision qui nuirait à sa rentabilité à court terme. Nous doutons que cette initiative ait obtenu un feu vert unanime et immédiat, puisqu’elle a été décrite comme un « acte de foi ». Pourtant, les coûts et les avantages ont montré, huit ans plus tard, que les avantages l’emportaient nettement sur les coûts.

Dans ce cas, sa responsabilité sociale, du moins dans les limites de son effectif, a rendu l’entreprise plus rentable. Mais que se serait-il passé si cela n’avait pas été le cas? Anglo American aurait-elle continué ou dû continuer d’offrir des médicaments contre le VIH si cela drainait ses profits à long terme? La réponse à cette question dépend de sa définition du développement durable et du rôle de l’entreprise à cet égard.

Ainsi, l’étape la plus importante consiste de loin à définir le développement durable. Tout le reste découle de cette étape.

À propos des auteurs

Dr. Nola Buhr est professeure de comptabilité à la Edwards School of Business de l’Université de la Saskatchewan, Canada. Ses recherches se concentrent sur la responsabilité et son travail porte notamment sur la divulgation comptable des résultats en matière d’environnement et de développement durable ainsi que sur l’histoire de la comptabilité. Dr. Buhr est l’auteur de nombreuses publications et siège sur sept comités de rédaction universitaires. Elle est une bénévole active auprès de l’Institut Canadien des Comptables Agréés. Elle a été présidente du Conseil sur la comptabilité dans le secteur public, qui établit les principes comptables pour tous les niveaux de gouvernement au Canada, et a siégé sur de nombreux comités de vérification gouvernementaux, y compris pour les ministères du Patrimoine canadien et des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Elle a obtenu son titre de comptable agréée en 1988 et a travaillé pendant cinq ans en pratique privée avant d’entrer dans le monde universitaire.

Dr. Rob Gray est professeur en comptabilité sociale et environnementale à l’Université de St. Andrews, en Écosse. Il est expert comptable qualifié et a été rédacteur du Social and Environmental Accounting Journal de 1991 à 2007. Il est également auteur et co-auteur de plus de 250 livres, monographies, chapitres et articles, notamment des ouvrages suivants : Accounting for the environment, Financial Accounting: practice and principles and Accounting and accountability: Changes and challenges in corporate social and environmental reporting. Dr. Gray est directeur du Centre for Social and Environmental Accounting Research (CSEAR). En 2004, il a été élu comme l’un des 14 membres fondateurs de l’ordre du mérite de la British Accounting Association et il est membre du comité responsable des enjeux sociaux et environnementaux de la Association of Chartered Certified Accountants.


Ressources Additionnelles