Crise sanitaire, changement climatique et tradition du silence

La crise du covid, le changement climatique et la tradition du silence constitue une combinaison dangereuse pour la dette des pays. Les pays ont accru leurs émissions d’obligations pour faire face à la crise sanitaire sans toutefois tenir compte des risques climatiques ni fournir d’information sur ceux-ci. Leur capacité de remboursement pourrait être compromise.

Par Paul Bostyn, stagiaire au REDD, et Marie-France Turcotte, professeure à l’École des Sciences de la Gestion, Université du Québec à Montréal

Dans un article publié dans Nature, les professeurs d’économie et de finance Dibley, Hepburn et Wetzer, des universités de Stanford et d’Oxford, s’inquiètent du manque de reddition de compte des nations quant aux risques liés aux changements climatiques. Selon eux, cela pourrait compromettre la capacité de plusieurs pays à rembourser les obligations émises. En effet, certains pays pourraient subir d’importantes pertes de PIB dues au changement climatique.

Dans un contexte où des milliards en obligations ont été émis pour faire face à la crise sanitaire, ces trois chercheurs remarquent que six gouvernements seulement révèlent leurs risques liés au changement climatique lors de l’émission d’obligations gouvernementales.  Seuls le Ghana, la Bulgarie, les Émirats Arabe Unis, les Bermudes, la République Dominicaine et le Salvador ont fourni des informations à cet égard. 77% des obligations gouvernementales mondiales ne fournissent aucune information quant aux risques climatiques du pays. Le silence à ce sujet prédomine.

Pourtant la reddition de compte est envisageable. Le groupe de travail sur la reddition de compte des risques climatiques (Task Force on Climate-Related Financial Disclosures) créé en 2017 par le Financial Stability Board propose des indicateurs aux entreprises afin de divulguer leurs risques. Les auteurs suggèrent qu’un tel groupe de travail collaboratif entre des représentants de la communauté scientifique, des gouvernements et d’analystes financiers soit créé pour promouvoir et guider la reddition de compte des États face au changement climatique.

 

D. Dibley, C.Hepburn et T.Wetzer (2021) “National COVID debts: climate change imperils countries’ ability to repay”, Nature


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