Menace d'exil climatique et enjeux sanitaires au Nord
Dû au réchauffement nordique, la communauté autochtone de Kivalina en Alaska est menacée d’exil climatique d’ici 2025. Pour répondre à ses enjeux sanitaires, elle collabore avec des partenaires pour traiter ses eaux usées et transformer ses déchets en ressources.
Collaborer pour trouver des solutions
Le village de Kivalina, une communauté autochtone baleinière (dont la subsistance est basée sur la chasse à la baleine) située en Alaska, est aux prises avec de multiples enjeux. La minière canadienne Teck Resources a collaboré avec NANA (la société régionale Iñupiat) pour les aider. Cette société a pour mission de promouvoir et encourager la croissance économique de la communauté. Rassemblant leurs forces et expertises, Teck Resources et NANA ont répondu à un enjeu prioritaire soulevé dès 2015 par le conseil de village autochtone et le conseil municipal de Kivalina.
Le village étant extrêmement isolé, il n’est relié à aucun système d’assainissement des eaux et de gestion des déchets. Les habitants étaient contraints d’installer des latrines de fortune dans leurs habitations puis de disposer des déchets dans la lagune avoisinante. Les conditions sanitaires et environnementales étaient désastreuses. Une étude a été menée pour trouver une solution ailleurs dans le monde afin d’adapter les installations sanitaires existantes aux conditions arctiques extrêmes en constant changement.
Un réchauffement climatique alarmant
En effet, depuis des décennies les habitants de Kivalina sont les tristes témoins du réchauffement climatique. L’Arctique se réchauffe deux fois plus vite que les régions situées à des latitudes plus basses. Les trois degrés de réchauffement climatique maximal prévus par les accords de Paris y ont déjà été dépassés. Si cette tendance persiste, le nord de l’Alaska devrait encore se réchauffer de six degrés d’ici la fin du siècle. Selon le corps du génie de l’armée de terre des États-Unis, Kivalina serait inhabitable d’ici 2025, faisant ainsi de ses habitants les premiers réfugiés climatiques du continent américain.
Ces données alarmantes ont été d’ailleurs confirmées par le récent Rapport sur le climat changeant du Canada rendu public le 1er avril 2019. Ce rapport a été rédigé par des scientifiques d'Environnement et Changement climatique Canada, de Pêches et Océans Canada et de Ressources naturelles Canada avec la contribution d’experts universitaires. Tous s’entendent pour affirmer que le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète. Pendant que la température moyenne annuelle du nord canadien a augmenté de 2,3 °C depuis 1948, bien au-delà des cibles de l’Accord de Paris, aucune action concrète n’a été entreprise. En comparaison, on apprend que la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) des États-Unis estime pour la même période un accroissement des températures moyennes mondiales d'environ 0,8 °C. À ces conditions « extrêmes » s’ajoutent une augmentation significative des feux de forêt, des canicules, des inondations au printemps et des pénuries d'eau l’été. Finalement, le rapport indique que : « si le réchauffement au Canada est le résultat à la fois de l'activité humaine et des variations naturelles du climat, « le facteur humain est dominant », en particulier les émissions de gaz à effet de serre ». Déjà les scientifiques du GIEC nous mettaient à leur tour en garde, à l’automne 2018, des lourdes conséquences d'un réchauffement climatique supérieur à 1,5 °C.
Faire face aux conséquences du réchauffement climatique
Alors que dans le passé se formait, à partir du mois d’octobre, une épaisse couche de glace sur la mer de Tchouktches, protégeant ainsi le village des assauts de l’hiver. Dès le mois d’octobre 2004, les habitants de Kivalina ont remarqué un changement lorsque l’absence de formation glacière a rendu la marée montante de plus en plus menaçante. Des vagues se sont alors écrasées sur la plage, inondant routes, maisons et école et emportant avec elles une grande partie du littoral (30 mètres). En 10 ans, le village a été envahi trois fois par la mer. De plus, alors que le village doit sa survie à la chasse à la baleine, aucune baleine boréale n’a été attrapée depuis plus de 20 ans. La glace n’est plus aussi épaisse qu’avant, rendant les déplacements en motoneige trop dangereux et empêchant les chasseurs d’établir des campements sécuritaires. Les Iñupiats font dont face à la surpopulation, aggravée par l’érosion et la disparition des terres, ainsi que le manque d’opportunités économiques. Tous ces facteurs poussent la communauté à relocaliser le village et considérer des installations portables.
Transformer des déchets en ressources
Dans l’optique de pouvoir amener une solution mobile et durable, Teck Resources et ses partenaires ont offerts aux habitants de Kivalina un réacteur à bio charbon. Très compact, puisqu’il prend place dans un seul conteneur, il peut être déplacé facilement vers de nouveaux sites. Après son démarrage il est tout à fait autonome en énergie, et peut donc être opéré partout. De plus, ce système basé sur un processus de pyrolyse (combustion à haute température) à air pulsé ne nécessite pas d’être relié aux canalisations. L’architecture de la toilette a été pensée pour intégrer une isolation, une ventilation, des mesures de santé et sécurité. Les déchets tels que lingettes et papier hygiénique sont prétraités avant la pyrolyse. L’extrant ainsi obtenu prend la forme de bio charbon à haute valeur en carbone et exempte d’agents pathogènes. Celui-ci peut être utilisé pour filtrer les odeurs, stimuler la croissance des plantes, être brulé pour produire de l’énergie ou encore réduire la pollution des sites contaminés.
Contribuer au développement durable
Dans une perspective de développement durable des communautés nordiques, le cas des autochtones de Kivalina fait réfléchir. Il fait ressortir les limites du pouvoir d’agir de ces communautés isolées malgré les urgences auxquelles elles font face. D’une part, on constate qu’il est possible, avec l’aide d’entreprises avoisinantes et de partenaires, d’apporter des solutions concrètes à des enjeux locaux spécifiques. Toutefois, pour les enjeux liés aux changements climatiques qui menacent l’existence même de leur communauté, on ne peut qu’espérer une mobilisation globale qui va permettre de passer rapidement à l’action…
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